Les nouveaux produits du marché des programmes

    1. Multiplication de l’offre de programmes
      1. Création de radios sur Internet

        Internet offre la possibilité de diffuser un programme avec un investissement relatif à la diffusion réduit. Les frais de diffusion étant relatifs à la bande passante requise par la diffusion du programme, qui est elle-même dépendante du nombre de personnes qui sollicitent une connexion, le diffuseur peut accroître sa bande passante proportionnellement à l’augmentation de son audience, donc de son chiffre d’affaire. Le risque est cependant de se laisser dépasser par la demande et donc de ne pas pouvoir maintenir la qualité de la diffusion.

        Les deux premières sociétés françaises à avoir lancé avec succès des radios tout Internet sont CENTPOURCENT avec son programme NET RADIO et Capitale PROD avec le programme NO PROBLEMO.

        NET RADIO fut lancée la première, la diffusion ayant commencé le 21 mars 1999. Elle est aujourd’hui leader des radios françaises sur l’Internet avec plus de 16 000 auditeurs par jour. L’Internet offre de plus la possibilité de multiplier les créations de programmes : WEBCITY lancée le 4 octobre 1999 venait s’ajouter à PAGEFRANCE.FM, CENTPOURCENT en 6 mois avait donc créé trois programmes radio.

        Depuis le 23 Juin 1999, NET RADIO est diffusée en numérique par satellite sur Eutelsat Hot Bird 4 et reprise en exclusivité sur le bouquet TPS (Offre radios, canal 28). Plusieurs radios suivent ce modèle de développement comme Radio Junior, elle aussi créée sur Internet avant d’être diffusée par satellite. En octobre 1999, plus de dix radios créées sur Internet sont diffusée sur le canal français du site www.tuner.fm.

        Cela montre bien que l’offre de programme était limitée non pas par l’absence de production potentielle mais par l’absence de canaux de diffusion rentables pour un format spécialisé, aussi longtemps que la FM était le seul canal. L’Internet est le canal de diffusion le plus accessible pour l’instant, mais le même phénomène se reproduira sûrement avec le DAB satellitaire à condition qu’il pénètre les foyers comme le fait Internet.

      2. Emergence de formats plus spécialisés

      NO PROBLEMO a un format musical " Black & Grove ", Radio Junior s’adresse aux 5-12 ans, NET RADIO a un format musique et information sur l’actualité de l’Internet et des nouvelles technologies. Tous ces formats ne pouvaient pas trouver leur place sur les ondes classiques. La diffusion d’un format spécialisé doit pour être couronnée de succès être très large et peu coûteuse. Ces deux conditions permettent de réunir une audience éparpillée, car plus le positionnement est pointu, moins le taux de pénetration d’un format est fort, et moins la rentabilisation des coûts de production et de distribution est aisée. Une diffusion large en FM était non seulement impossible pour un nouvel arrivant en raison de la saturation des fréquences sur les zones urbaines, mais en plus elle aurait été trop coûteuse pour permettre de rentabiliser un format spécialisé.

      Cette multiplication des formats avait était souhaitée et prédite par Pierre Bélanger, président et fondateur de Skyrock, dans son ouvrage, La Radio du Futur, en 1991. Son analyse des générations successives de radios abonde dans ce sens. La première génération, marquée par une concentration de l’offre, fonctionnait sur le principe de "à chacun son émission" pour toucher la plus grande proportion de la population au cours de la journée, la cible pouvant varier au cours de la journée. La deuxième génération fut marquée par la multiplication des radios se concentrant sur des cibles particulières, "à chacun sa radio". La troisième génération, émergeante au début des années 90, en pleine croissance maintenant a pour principe "a chacun sa musique" ou "à chacun son centre d’intérêt" selon que le format est musical ou bien parlé. Depuis, la tendance s’est accélérée, la segmentation de l’offre se rapproche de la granularité de la demande : l’individu. Des sites Internet proposent de créer son propre programme en fonction de ses goûts, des genres que l’auditeur souhaite écouter et de la proportion respective de chacun. Imagineradio.com, devenue radio.sonicnet.com en novembre 1999, créé ainsi un canal spécifique pour chaque auditeur qui en fait la demande.

      Le groupe Europe Communication prépare aussi une offre de programmes sur Internet, "Music In Europe". Ce site, véritable portail musical, proposera des clips vidéo, des informations musicales, des flashs d’information et une multitude de canaux musicaux très ciblés réexploitant l’expertise dans le marketing musical du groupe.

      Dans une interview parue dans Les Echos le 24 novembre 1999, Frédéric Schlesinger, directeur général du Pôle FM de Europe Communication, annonce la création d’une offre Business to Business accompagnant la création de ce portail musical : proposer aux enseignes des programmes sur mesure correspondant à leur identité, pouvant diffuser le matin des messages du management.

      Le développement de ce marché aboutira au développement de nombreux programmes spécialisés dont la diffusion n’est rendue possible que par la baisse des coûts fixes de diffusion grâce aux supports numériques.

      Les formats musicaux sont les moins coûteux grâce aux systèmes d’automatisation ; ce sont aussi ceux qui permettent les plus grandes économies d’échelle sur le personnel car la même équipe de programmation peut traiter plusieurs programmes. Dans les groupes français de radios privées, seules les équipes de production et d’antenne sont distinctes pour garder des couleurs d’antenne différentes. Même les moyens techniques peuvent être mis en commun. Le coût marginal de l’équipement pour produire un programme supplémentaire est limité à une capacité de stockage supplémentaire et, suivant les systèmes utilisés, des licences supplémentaires.

      Le succès des formats musicaux stimule donc la multiplication des radios et rend possible l’entrée de nouveaux arrivants, comme CENTPOURCENT ou CAPITAL PROD qui n’auraient pas pu se lancer sur des formats à création de contenu propre (formats tout information et animation).

    1. Diversification multimédia des programmes radio
      1. Données associés
      2.  

La possibilité d’associer des données numériques aux programmes radios permet de les compléter par l’apport d’un contenu en rapport avec le programme diffusé ou bien par rapport aux services attendus par les auditeurs dans leur situation d’écoute. Une grande partie de l’audience radio est mobile, c’est à dire située dans un véhicule. Cela ne permet pas de demander une interactivité constante de leur part. Par contre, il est possible de leur offrir des services qu’ils attendent d’une radio comme par exemple l’état du trafic routier sur la zone géographique d’écoute. C’est en effet l’information trafic qui a alimenté les premiers canaux de données associées.

En France, le groupe Europe Communication a annoncé en juin 1998 le développement de services à valeur ajoutée au travers de sa filiale EUROPE SERVICES INTERACTIFS. Un mois plus tard, dans " Le Journal du Groupe ", Bruno Robert de EUROPE SERVICES INTERACTIFS annonce officiellement le lancement de SKIPPER :

" Il s’agit d’un pare-soleil, intégrant un récepteur RDS (sous-porteuse FM), capable d’afficher en temps réel l’état de la circulation parisienne. Pratiquement, deux cartes rétro luminescentes (une de Paris, une de la banlieue) affichent, sous forme de points lumineux, l’intégralité des bouchons détectés. Le " SKIPPER " est mis à jour par les ondes d’Europe1 (104.7 FM) depuis l’émetteur de la Tour Eiffel. Un système particulièrement ingénieux de collecte de l’information trafic a été mis en place avec les Taxis Bleus. "

Ce produit est vendu 2 490 francs TTC et sans abonnement depuis le 1er mars 1998. Le système de collecte de l’information par les taxis de la ville en fait un système transposable à n’importe quelle grande ville du monde sans travaux d’infrastructure.

Si le système de collecte est bien intéressant, la diffusion par sous-porteuses FM subira bientôt l’assaut de la diffusion numérique, terrestre et surtout satellitaire, ou même de la connexion Internet des véhicules.

Dans " Radio World " du 14 avril 1999, le lancement d’un service d’information-trafic sur l’agglomération de Toronto, diffusé en DAB est annoncé. " Drives " utilise la technologie de DAB terrestre définie par Eureka 147. Les récepteurs DAB doivent être équipés d’écrans LCD de 16 centimètres de diagonale. L’avantage réside dans la mise à jour de la carte de fond et la plus grande finesse dans la description de l’état de circulation que les diodes de SKIPPER ne permettent pas. La collecte d’information repose sur une base similaire : une grande partie provient de capteurs de vitesse situés dans les bus qui transmettent en plus leur position GPS.

 

Autres types d’application

D’autres services de renseignement aux consommateurs peuvent être développés : actualités, renseignements météorologiques, informations sportives ou tout autres renseignements rattachés à la radiodiffusion que les producteurs de programmes ont déjà à disposition, dans des quantités supérieures à ce qui peut être diffusé dans leur format d’antenne mais qui constitue un réel attrait pour l’auditeur. Les services de renseignements à l’entreprise sont une seconde catégorie de données associées pouvant être diffusées en parallèle de la publicité. Outre ces deux types de services classiques, le rapport " Evaluation du marché de la diffusion de données par radio " préparé par le groupe de travail sur la mise en œuvre de la radiodiffusion audionumérique met en avant deux autres catégories de services pouvant être apportés par les radios : les services de messagerie et ceux de contrôle / télémesure / géopositionnement.

Les services de messagerie seraient " mieux servis par les technologies bidirectionnelles. (…) Les occasions sont évaluées du point de vue du grossiste pour la vente de capacité de voie de sous-porteuse directement aux exploitants de services de télé appel. (…) Une entrée directe dans le marché des services de télé appel pourrait conduire à de plus grandes économies d’échelle et à des occasions de revenu pour les radio diffuseurs. " Cette activité peut sembler menacée par le développement de la téléphonie mobile, mais les services de télé appel par radio permettent de transmettre des données plus nombreuses que par les réseaux de téléphonie mobile, et en plus de l’envoyer à un groupe d’utilisateurs pour le même prix que l’envoi à un individu, contrairement à la téléphonie mobile. Les données associées permettent par exemple de transmettre des ordres de mission détaillés, en y ajoutant une carte, de transmettre des communications d’urgence, du courrier électronique ou d’annoncer des événements spéciaux, ce pour un coût faible dès lors que les messages s’adressent à un groupe.

Selon le rapport canadien, parmi les applications des services de messagerie par la radio numérique, seul le développement du télé-appel pourra représenter une réelle opportunité économique. Les radios ne souhaitant pas prendre de risque sous-loueront leur capacité à des entreprises de télé-appel existantes, d’autres pourront se lancer sur le marché avec de forts atouts pour une diversification réussie.

Le géopositionnement par radio numérique permettrait un positionnement plus précis et la transmission de plus de données. Au Canada, les radios auront la possibilité de sous-louer leur capacités aux transports maritimes. La régulation du trafic routier est une autre application à développer en collaboration avec les autorités publiques et transposable ailleurs. Cette activité n’est pas présentée comme une opportunité commerciale significative.

 

Stratégie recommandée

Le groupe de travail canadien recommande une entrée sur le marché par la vente de services de renseignements sur la circulation, puis d’informations diverses (météo, sports…), enfin par le développement de nouvelles messageries publicitaires. Ces activités mèneraient à une rentabilité immédiate.

Nous remarquons en plus que ce sont précisément les activités qui sont accessibles à toutes les radios, privées ou publiques, même de petite taille, du moment qu’elles produisent un contenu d’intérêt local, ce qui est le cas de toute radio privée qui survit sur son marché.

 

  1. Internet

L’Internet permet de diffuser toutes les données associées énoncées précédemment avec des coûts minimes, et même de compléter l’offre de contenu par des liens vers d’autres bases de données. Une émission culturelle, sur un auteur, peut ainsi proposer des liens vers le site de sa maison d’édition, les sites consacrés à son mouvement littéraire ou même aux sujets abordés. La séparation physique des fenêtre de diffusion de programme et des navigateurs Internet permet de ne pas perdre l’auditeur alors qu’il est dirigé vers un autre contenu visuel complétant l’émission.

Par cette technologie, la distinction entre télé et radio devient plus floue. Des images sont diffusées, parfois des séquences vidéo. Les radios de l’Internet, en développant leur compétences techniques accèdent aux mêmes possibilités que les télévisions. NET RADIO à d’ailleurs lancé le 4 octobre un bouquet de chaînes de télés sur Internet : ZAPPING.FR. Dans sa première version, le bouquet propose des programmes à la demande, produits par des chaînes thématiques par exemple Comédie !. Zapping propose aussi des flashs d’information, des rubriques cinéma et prévoit une rapide extension de son offre.

Le site de Canal Web (www.canalweb.net) offre la possibilité à n’importe quelle entreprise de diffuser des images sur Internet par sa Web TV. NRJ s’est essayé pour la première fois à la diffusion vidéo sur Internet en septembre 1999 avec la diffusion en direct de la Techno-parade de Paris. Cet événement était annoncé à l’antenne était accessible directement à partir du site de la radio, www.nrj.fr. NRJ prépare actuellement des projets de télé interactive.

Internet révèle la facilité des radios à traiter l’Interactivité et la diffusion multimédia en direct. Les radios parviennent à produire avec des moyens minimalistes là où les chaînes de télé ont déjà un équipement vidéo lourd, certes de qualité mais actuellement inadapté aux capacités de l’Internet.

    1. Les nouvelles sources de revenu
    2.  

Une station de radio peut générer de nouveaux revenus grâce à la diversification de son offre de programme, à sa numérisation et à son site web, en tirant profit des données déjà produites pour son programme audio et avec très peu de compétences informatiques nécessaires en interne.

Ces caractéristiques sont nécessaires pour intéresser les groupes de radios privées. En effet, le montant de l’investissement, et donc le risque, doivent être limités, et le retour sur investissement rapide.

      1. Les revenus directs du site web
        1. La publicité
        2. Un site très fréquenté peut vendre son audience grâce à des bannières publicitaires. C’est la source de revenu la plus facile à exploiter sur le web. Des régies publicitaires spécialisées dans la vente d’audience des sites existent, les radios ont d’ailleurs déjà toutes une régie qui peut étendre ses compétences à l’Internet. C’est le cas par exemple de IP Régies, régies des radios de la CLT, qui a créé la cellule IP Interactive en 1998. La régie a tout d’abord commercialisé les espaces publicitaires des sites du groupe (RTL, FUN, RTL2), s’est ensuite diversifiée avec DégrifTour et RéducTout, puis a continué à développer son offre d’espace sur Internet avec d’autres sites en dehors du groupe de la CLT.

        3. Les nouveaux services
        4. De nouveaux services peuvent être vendus directement sur le site. Ce sont par exemple des bulletins d’information suffisamment spécialisés pour être achetés par un public ciblé : résultats sportifs, analyses boursières, information financière, trafic routier. Les mailing listes peuvent être envoyées directement sur la messagerie électronique d’un téléphone cellulaire, un chauffeur de taxi indépendant pourrait ainsi être averti de tout accident majeur intervenant dans sa zone, de la même façon que les affiliés aux grandes sociétés de taxis. Ces services dépassent bien entendu la simple mise à disposition d’information sur le site web et sont liés à d’autres canaux de diffusions ouverts par le numérique. Le site de la station pourra de toute façon servir de plate-forme commerciale et promotionnelle à l’ensemble de l’offre de service de la station.

        5. Le commerce électronique

          Les stations de radios peuvent utiliser l’audience capturée par leur site à des fins de commerce électronique. Deux produits s’imposent : le merchandising de la station et la musique.

          Le marchandising peut comprendre un ensemble infini de produits estampillés au logo de la station. Il est rendu connu de l’audience audio par les jeux à l’antenne. Ceux qui n’ont pas la chance de gagner pourront désormais réduire leur frustration en achetant le lot sur le site. Jusqu’ici, aucune station ne communique sur ce thème. La logistique du marchandising vendu n’est pas plus complexe que la logistique des cadeaux promotionnels et celle de la vente de disques en ligne, le savoir-faire est donc déjà présent dans la station.

          La vente de musique ne relève par contre pas de la compétence des stations de radio. Des sociétés sont spécialisées dans la vente en ligne de disques comme CDnow ou Boxman, et des distributeurs classiques se sont aussi lancés sur le secteur, la FNAC ou Barnes & Nobles. Pour ne citer qu’elles, ces sociétés peuvent faire des partenaires parfaits pour la vente de disques, en retour, la station de radio est un intermédiaire commercial idéal. Les stations musicales ont en effet une audience très segmentée qui est attirée par la musique diffusée qui participe à l’élaboration des hit parades des stations et qui achète chez les disquaires les titres qu’elle écoute sur ses stations préférées. La diffusion numérique permet d’avoir en direct le nom de l’artiste, le titre et même des informations complémentaires. Internet permet en plus d’avoir un retour direct possible de l’auditeur : ce titre lui plaît, d’un simple clic sur une icône " Acheter le titre diffusé " de son lecteur audio, il peut l’ajouter à son caddie virtuel chez un des fournisseurs cités précédemment. Les radios nées uniquement sur l’Internet utilisent déjà cette source de revenu, comme www.jukebox.com qui s’était alliée à Cdnow avant d’être racheté par Yahoo !. La station de radio touche alors un pourcentage des ventes réalisées par l’intermédiaire de son site. Le savoir-faire spécifique et le travail marginal est quasi nul grâce aux systèmes d’automation et aux études précises des segments d’audience déjà effectuées.

          L’affiliation à un distributeur est nécessaire car les compétences de vente par correspondance sont totalement étrangères aux radios et leur acquisition constituerait une diversification stratégiquement incohérente, les synergies avec le cœur de métier de la VPC ne la justifiant pas.

          Par contre, le téléchargement ne nécessite pas de compétences logistiques et les radios possèdent déjà en interne celles de l’administration de bases de données et de sites Internet. De plus le marketing des programmes et la recherche musicale peut être directement appliquée à la production de programmes musicaux aux formats précis diffusés sur Internet. Ces programmes Internet, comme les classiques programmes de la FM, créent une demande mais offrent en plus par le téléchargement la possibilité de réaliser l’acte d’achat immédiatement. Les synergies entre la vente par téléchargement et les radios sont donc fortes. Peu après le lancement du site I-Fun de Fun Radio, Alain Weil, directeur général du groupe NRJ, a ainsi annoncé en octobre 1999 que "le chiffre d’affaire généré par le net (par NRJ) doit être le même que celui des activités radio dans cinq ans" (Musique Info Hebdo). Le téléchargement est dans cette stratégie la principale source de revenu. Pour accélérer l’acquisition ds compétences manquantes, le groupe NRJ a essayé d’acquérir le site de vente de musique en ligne Musictoyou.com. Ce projet n’a pas abouti et en novembre 1999, le groupe NRJ semble s’orienter vers le développement en interne des compétences recquises.

          Un système d’automation reposant sur une base de données unifiée est une nécessité technique à l’élaboration d’un modèle économique optimal. La base de données stockant les titres, musique ou information, et des données associées, peut être utilisée sur différents supports, exploitant simultanément des données différentes. Par exemple, la diffusion FM ne sollicitera que les fichiers audio programmés alors que le DAB utilisera en plus du texte stocké dans la fiche titre de la base ainsi que des images associées comme la pochette de l’album. L’Internet peut dans le même temps solliciter des informations différentes de la même base : les titres les plus joués en FM sont diffusés en boucle alors que les informations sur n’importe quel titre de la base sont en libre accès. La base unifiée réduit le coût marginal de production de programme multimedia et permet donc aux diffuseurs de dégager un profit plus fort.

          L’éditeur de logiciel Dalet a déjà réalisé une base de données unifiée capable d’être utilisée par la rédaction, par différentes stations et par la diffusion publicitaire. Maintenant, le produit VisionCastâ permet la diffusion multimedia, en DAB ou sur Internet à partir de la base.

          Figure 4 : Exemple de Webcasting par VisionCast

          Dans cet exemple, un programme est diffusé en streaming. Le titre, l’artiste et la pochette de l’album sont affichés et d’un simple clic, l’auditeur-surfeur peut acheter le disque.

           

          Il existe une autre source de revenu : un mix de la vente de marchandising et de musique peut aboutir à de nouvelles ventes, la vente des lots offerts lors des concours. Les auditeurs pourront trouver sur le site de la station un lien vers le site de vente électronique du fournisseur qui a effectué la promotion d’un de ses produits grâce au concours à l’antenne. Là encore, une commission serait reversée à la radio pour chaque vente conclue par l’intermédiaire de son site.

           

      2. Les revenus indirects

L’audience du programme diffusé en streaming sur Internet accroît l’audience globale du programme et donc le prix de vente de l’espace publicitaire. Depuis 1998, Marketron, l’institut de mesure d’audience des radios américaines ajoute à l’audience AM ou FM des stations l’audience du programme sur Internet. Aux régies publicitaires d’en tirer profit.

 

La fidélisation de l’audience

La fidélisation de l’audience est plus difficilement mesurable mais fait partie des bénéfices du site. En offrant des services gratuits comme l’accès aux titres les plus diffusés, ou en montrant des photos de ses animateurs avec une brève description (www.europe2.fr), en faisant visiter ses studios (www.virginradio.uk) , une station accroît le sentiment de proximité qu’ont ses auditeurs, ce qui contribue à leur fidélisation. D’autres services peuvent être proposés gratuitement pour informer les auditeurs par e-mail des programmes à venir et donner des informations complémentaires.

Reprenons le cas étudié dans le rapport du NAB, Internet Age Broadcasters (p38) : KCPQ-TV. Le même projet de création d’un club de fidélisation de l’audience est directement transposable à la radio. Le but est de créer une relation interactive avec l’audience et d’accéder à une plus forte notoriété ainsi qu’à une meilleure image de marque. Ainsi, l’auditeur sondé mentionnera en écoute de la veille tout naturellement la station avec lequel il a le plus d’affinités.

Une note d’information est l’élément clef d’un club de fidélisation. Les auditeurs-surfeurs s’inscrivent sur une liste de diffusion pour recevoir des informations régulières sur leur programme préféré. KCPQ-TV à Seattle l’a fait pour son programme " Kid’s Club " qui comprenait 180 000 membres en 1998. Le succès du programme et du site était antérieur à la création de la liste de diffusion, mais il l’a renforcé.

" Alors que nous proposions des activités interactives et des informations sur le club à la communauté dans la section " Kid’s Club " de notre site depuis plus d’un an, nous avons récemment développé une liste de diffusion gratuite. Les enfants et leur famille reçoivent notre lettre d’information gratuite " Virtual Zone " par e-mail. Nous ne collectons que leur nom d’utilisateur (optionnel) et leur e-mail. La liste est gardée confidentielle et n’est utilisée que pour envoyer la lettre d’information et occasionnellement un bulletin de la station. La réaction fut énorme avec plus de 100 inscriptions dès le premier jour de la mise à disposition sur le réseau. "
Greg D. Sundberg, Directeur marketing on-line, KCPQ-TV, Seattle

Ce type de fidélisation peut être obtenu par des media classiques mais avec des coûts et une fréquence de diffusion différentes. Pour un club du type " Kid’s Club " de KCPQ-TV, regardons la différence de budget entre les media classiques et l’Internet :

 

Club de fidélisation utilisant les media traditionnels

Media

Objet

Coût

Système téléphonique interactif Inscriptions/correspondance 48 000 $
Formulaires d’inscription Inscription 2 500 $
Cartes / Mailings Identification des membres 75 000 $
Bulletin d’information / Mailing Correspondance mensuelle 300 000 $
Total   425 000 $

 

Club de fidélisation utilisant l’Internet

Media

Objet

Coût

Mise à jour du site

Correspondance du club

20 000 $

Formulaire en ligne

Inscriptions

200 $

ID / Mot de passe

Identification des membres

5 000$

Bulletin d’information par e-mail

Correspondance mensuelle

1 200$

Total

 

26 400 $

Cet écart considérable est très représentatif de l’esprit qui anime l’économie virtuelle dans son ensemble : augmenter la qualité de service par une compression radicale des coûts, situation qui pour l’économie traditionnelle semble paradoxale. C’est en effet en compressant les coûts, jusqu’à un coût marginal nul que les entreprises de l’économie virtuelle propose des services absents jusqu’alors par manque de rentabilité, comme ce club de fidélisation ou même l’ensemble des services et du marketing "one-to-one".

 

      1. L’exemple du site de Virgin Radio à Londres

Virgin Radio applique à la lettre les modèles économiques les plus performents de l’Internet sur son site www.virginradio.com :

  • Mise à disposition d’un contenu gratuit, fréquement remis à jour et ciblant les intérêt des auditeurs, constituant un véritable magazine musical
  • Un recyclage de l’audience de l’Internet sur le programme radio par un rappel du programme en cours et la possibilité de l’écouter sur son ordinateur en direct
  • Fidélisation des auditeurs par le développement de l’image de la radio (photos des animateurs, e-mails, visite des studios en 3D) et par des jeux concours
  • Marchandising électronique gratuit (jingles à télécharger, fonds d’écran)
  • Vente en ligne des titres de la playliste, proposition d’une sélection par les auditeurs et accès à une base de recherche de titres disponibles à la vente avec paiement sécurisé sur le site
  • Possibilité d’en savoir plus sur les annonceurs.

L’originalité de ce site est d’appliquer parfaitement tous les standards de l’économie virtuelle en développant les synergies avec son programme radio. De nombreux facteurs clés de succès de la diversification vers l’Internet sont réunis par cette radio novatrice, elle diffuse son programme sur Internet depuis 1996. Ce site peut servir de modèle à toute radio musicale prête à miser sur la diversification de ses canaux de diffusion de contenu et se donnant les moyens du succès.

 

  1. Créer un mouvement cyclique de l’audience autour de son contenu

L’audience de l’Internet est très volatile. L’internaute passe très vite d’un site à l’autre, et ne se concentre pas sur un même thème plus d’un quart d’heure. Comment alors le retenir sur un programme, même si celui-ci lui offre des données associées en plus du classique audio ? La radio occupe le temps secondaire de l’auditeur, c’est à dire qu’il peut continuer à faire une autre activité pendant qu’il écoute passivement. Dès lors que des données associées sont offertes, le programme occupe le temps primaire : il n’est plus possible de continuer à faire la cuisine ou conduire en lisant la biographie de l’artiste que l’on entend chanter. Or, il est plus difficile de retenir un consommateur de programme alors que l’on occupe son temps primaire puisque l’offre doit alors être plus intéressante que l’activité à laquelle il doit renoncer. Les programmes numériques, que ce soit par l’Internet ou bien par le DAB doivent laisser l’auditeur libre d’y consacrer son temps secondaire ou primaire. Approfondissons l’exemple de l’Internet. L’internaute consacre son temps primaire à la collecte d’information, au divertissement, à dialoguer ou à acheter. Sur ces activités, il passe rapidement d’une offre à l’autre par l’intermédiare de son logiciel de navigation. Un programme radio peut demeurer en toile de fond et recycler son audience vers du contenu multimedia, donc capter le temps primaire de l’auditoire, tout en sachant qu’il n’est pas statique. Une hypothèse intéressante à valider par une étude quantitative serait que le programme numérique le plus efficace, donc retenant ses auditeurs et le faisant participer, serait celui qui permettrait à son audience d’occuper comme il lui plaît son temps primaire tout en lui suggérant des activités auxquelles il peut consacrer son temps primaire si elles l‘intéressent. Pratiquement, des liens peuvent être diffusés dans le récepteur de programmes Internet (lecteur G2 par exemple) et l’Internaute clique dessus lorsqu’il veut approfondir un élément du programme audio qu’il a entendu comme un sujet du flash d’informations ou une publicité. Dès que cette source d’information est épuisée où qu’elle ne l’intéresse plus il pourrait continuer à surfer sur Internet tout en continuant à écouter le programme diffusé par une application différente du navigateur Internet. L’audience sur les media numériques peut être perçue comme des flux, qui donc ne peuvent pas être captifs mais captés, ponctuellement, vers une offre de contenu de divertissement, de dialogue, d’information ou de vente. Capter les flux d’audience est la première source de création de valeur à travers des programmes. Ensuite, la capacité des stations à négocier des alliances avec des sites de commerce électronique, des régies publicitaires ou des sites dont le revenu est la publicité permettra de transformer ces flux en revenu.

 

Tableau 3 : Créer un mouvement cyclique de l’audience autour d’un contenu

Type de contenu

Programme radio

Contenu Internet suggéré

Contenu Internet aléatoire

Capital temps du consommateur utilisé

Temps secondaire

Temps primaire

Temps primaire

Volatilié de l’audience

-

+

+

Revenu potentiel pour la radio

Publicité classique (audio)

  • Rémunération des connexions générées (publicité)
  • Commissions sur ventes par affiliation à des sites de commerce électronique

Aucun

Outil de réception

Récepteur Internet

Navigateur

Navigateur

Indépendance des contenus

Indépendant

Suggéré par le programme radio, exclut le contenu aléatoire

Exclut le contenu suggéré

Ce tableau décrit les mouvements possibles de l’audience des programmes Internet. Une fois capté sur le programme radio, l’internaute doit pouvoir continuer à surfer, accompagné par le programme qui lui suggère du contenu associé, par l’intermédiaire de sites ou d’images et de textes diffusés en même temps que l’audio. L’internaute continue donc à surfer sur du contenu aléatoire (du point de vue de la radio) mais peut, dès que son attention est captée par un thème du programme radio, être capté sur un contenu suggéré par le programme radio qui cette fois occupera son temps primaire et pourra être abandonné tout en conservant le programme radio, qui ainsi pourra recycler l’audience vers du contenu suggéré.

    1. Les atouts du succès des sites Internet des stations

Toute société se lançant dans la création d’un site Internet de divertissement ou d’information doit embaucher du personnel, produire du contenu, acheter de l’espace publicitaire pour attirer des visiteurs sur son site et créer une source immédiate de revenu pour continuer ses opérations (Internet Age Broadcasters, NAB). Regardons ce dont les stations de radio disposent déjà : une audience loyale et prête à interagir, un canal de diffusion pouvant servir de support promotionnel à son site, un fichier d’annonceurs intéressés par sa cible, un programme diffusé 24h/24h et déjà une source de chiffre d’affaire établie.

Les stations de radio ont une audience déjà segmentée et identifiée qui se retrouve sur le site. Cette audience est même accrue par la diffusion en direct sur le site car la radio peut alors toucher une audience " au travail ". Cette audience au travail augmente l’audience globale de la station et peut intéresser de nouveaux annonceurs cherchant à atteindre les auditeurs en situation, par exemple les constructeurs d’informatique et bureautique. Si la créativité des responsables de programmes multimedia est relayée par celle de la régie commerciale, les possibilités d’accroissement du chiffre d’affaire des stations grâce à leur site sont énormes.

De plus, les sites des radios peuvent attirer une audience toute nouvelle, en dehors de la zone de couverture hertzienne, qu’il s’agisse de personnes ayant déménagé ou d’internautes totalement extérieurs à la zone de diffusion mais étant intéressés par les thèmes traités par la station. Ainsi, le résultat d’un match de football et son commentaire pourra être disponible et avant-première sur le site d’une station locale, qui est automatiquement mis à jour grâce aux informations de la base de données déjà produites pour le flash d’information.

FIN